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Seder Olam Revisité: F22- Juges

Updated: 1 day ago

CHRONOLOGIE BIBLIQUE

Génération 22 : Années hébraïques 2520 à 2640 (1240-1120 av. J.-C.)


Introduction

Après la conquête partielle de Canaan et la mort de Josué et des Anciens, les Israélites s'écartent des commandements de Dieu. L'oppression commence et des juges sont choisis pour redresser le peuple.


An hébreu 2536 – 1224 av. J.-C. – Mort de Josué

À la fin de sa vie, Josué adressa un avertissement sévère aux tribus d'Israël à Sichem (aujourd'hui Naplouse) :


"Prenez donc garde à vous-mêmes et à aimer l'Éternel, votre Dieu. Si vous retournez, si vous vous attachez au reste de ces nations [païennes], à ceux qui sont restés parmi vous, si vous vous mariez avec elles, si vous vous unissez à elles, et elles à vous, sachez avec certitude que l'Éternel, votre Dieu, ne chassera plus ces nations loin de vous ; mais elles seront pour vous un piège et un filet, un fléau dans vos flancs et une piqûre dans vos yeux, jusqu'à ce que vous ayez disparu de ce bon pays que l'Éternel, votre Dieu, vous a donné." (Josué 23:11-13)


Avant de mourir, Josué écrivit le Livre de Josué, qui portera plus tard son nom, et qui suit les cinq livres de la Torah, ledit livre de la loi de Dieu, tel que mentionné dans le texte suivant :


Josué conclut une alliance avec le peuple ce jour-là et leur imposa une loi et une ordonnance à Sichem. Josué écrivit ces paroles dans le livre de la loi de Dieu ; il prit une grande pierre et la dressa là, sous le pistachier qui était près du sanctuaire de l’Éternel. Josué dit à tout le peuple : "Voici, cette pierre nous servira de témoin, car elle a entendu toutes les paroles que l’Éternel nous a adressées ; elle servira donc de témoin contre vous, afin que vous ne reniiez pas votre Dieu." (Josué 24:25-27)


Josué mourut à l’âge de 110 ans (Josué 24:29, Juges 2:8), au même âge que Joseph. Comme il avait 30 ans à l'époque des explorateurs, en l'an hébreu 2456 (voir document F21b), il mourut donc en l'an hébreu 2536 (1224 av. J.-C.), soit 82 ans après l'Exode (2454) et 41 ans après le début de la conquête de Canaan (2495).


C'est à Sichem que les Israélites transportèrent également la dépouille de Joseph, qu'ils avaient sortie d'Égypte. Ils l'y enterrèrent, dans le champ que son père Jacob avait acheté, et y érigèrent un mausolée. Curieusement, le Nouveau Testament indique à tort que les tombeaux des patriarches se trouvaient à Sichem, au lieu d'Hébron (Actes 7:15). Le tombeau de Joseph fut détruit en 2000 par une foule palestinienne pendant la Seconde Intifada, malgré les promesses de tous les camps de préserver les sites religieux. Depuis, malgré des restaurations, il est régulièrement vandalisé.


Tombeau de Joseph
Tombeau de Joseph (David Roberts 1839)

À propos de la récupération du cercueil de Joseph par Moïse en Égypte, la tradition suivante relate comment il a découvert son emplacement :


R. Nathan raconte : Il [Joseph] fut enterré dans le sépulcre des rois [la Vallée des Rois à Louxor, où les tombeaux étaient cachés aux regards humains et dont l’accès était recouvert de sable] ; Moïse alla se tenir près du sépulcre des rois et s’écria : "Joseph ! Le temps est arrivé où le Saint, béni soit-Il, a juré : Je te délivrerai, et le serment que tu as imposé aux Israélites est arrivé ; si tu te montres, tant mieux ; sinon, voici, nous sommes libérés de ton serment." À cet instant, le cercueil de Joseph trembla, et Moïse le prit et l’emporta avec lui. (Talmud, Sotah 13a)


Vers l'an hébreu 2540 – 1220 av. J.-C. – La tribu de Dan

La tribu de Dan fut la dernière à recevoir son lot, qui s'étendait de la limite occidentale des plaines de Judée jusqu'au littoral. Ce territoire était le plus petit et le plus problématique, car il ne comportait pratiquement aucune colline pour se défendre et constituait la voie antique reliant l'Égypte à la Mésopotamie via le royaume d'Aram au nord du Croissant Fertile. De plus, les puissants Philistins, qui possédaient des chars et maîtrisaient l'utilisation du fer dans leurs armes (au lieu du bronze), contrôlaient déjà cette zone côtière.


Aussi, dès la mort de Josué, une partie des Danites décida de chercher un autre territoire, évidemment hors des frontières de leurs frères israélites. La Bible nous dit que les Danites envoyèrent cinq espions pour trouver un lieu d'établissement au nord de la Terre d'Israël, et qu'ils revinrent rapporter ce qu'ils avaient trouvé.


Les cinq hommes [de Dan] partirent et arrivèrent à Laïs. Ils virent le peuple qui s'y trouvait et constatèrent qu'il vivait en sécurité, à la manière des Sidoniens, tranquille et en sécurité. Car il n'y avait personne dans le pays, détenant l'autorité, qui pût les couvrir de honte en quoi que ce soit, et ils étaient loin des Sidoniens [Sidon était leur ville d'origine sur la côte du Levant], et n'avaient de relations avec personne. Ils rejoignirent leurs frères [de Dan] à Tsorea et à Eshthaol. Leurs frères leur dirent : "Que dites-vous ?" Ils répondirent : "Levez-vous et montons à leur rencontre ; car nous avons vu leur pays, et voici, il est très bon ; et vous, restez-vous tranquilles ? N'hésitez pas à aller prendre possession du pays. En partant, vous arriverez chez un peuple en sécurité, et le pays est vaste ; car Dieu l'a livré entre tes mains : un lieu où il ne manque de rien, où il y a tout ce qui est sur la terre." De là, de Tsorea et d'Eshtaol, partirent six cents hommes de la famille des Danites, ceints d'armes de guerre. (Juges 18:7-11)


La ville de Laïs semblait la cible idéale. Elle était située à la source d'un cours d'eau puissant (plus tard appelé la rivière Dan), sur une terre très fertile. Mais elle était habitée par des gens étrangers à la région, éloignés de leur base principale (le royaume de Sidon, la Phénicie), qui ne pouvaient espérer aucun soutien militaire de leurs voisins cananéens en cas d'attaque.


Six cents Danites partirent donc vers le nord et s'emparèrent de Laïs, qu'ils renommèrent "Dan". Le reste des Danites resta dans son lot initial, installé sur les collines proches de celles de Juda, sans chercher à conquérir le territoire difficile qui leur avait été attribué.


Les conquérants de Laïs détruisirent la ville et l'incendièrent. Ils conservèrent une partie des remparts et de la porte de la ville pour protéger la nouvelle ville de Dan qu'ils bâtirent. Ce territoire était si éloigné du centre de la vie israélite que ces Danites établirent leur propre culte. Pour ce faire, ils firent appel à un Lévite nommé Michée pour fabriquer une image taillée :


Ils appelèrent la ville Dan, d'après le nom de Dan, leur ancêtre, l'un des fils d'Israël [Jacob] ; pourtant, le nom de la ville était Laïs à l'origine. Les fils de Dan érigèrent l'idole à leur image. Jonathan, fils de Guerschom, fils de Manassé, fut prêtre avec ses fils de la tribu des Danites jusqu'au jour de la captivité du pays [à l'époque de la conquête assyrienne]. Ils érigèrent donc l'idole taillée que Michée avait faite, tout le temps que la maison de Dieu fut à Shilo. (Juges 18:29-31)


Aujourd'hui, Tel Dan est un site archéologique important de la Terre d'Israël et un parc national. Les fouilles ont mis au jour de nombreux objets d'influence phénicienne et égéenne, confirmant ainsi le récit biblique selon lequel cette ville était habitée par des Sidoniens avant la conquête par les Danites.


Les remparts et la porte israélite de Tel Dan
Les remparts et la porte israélite de Tel Dan (photo : Albert Benhamou)

An hébreu 2552 – 1208 av. J.-C. – La stèle de Méneptah

Lorsque les Israélites commencèrent à s'écarter des voies divines, Dieu leur envoya des menaces ennemies de plus en plus graves au fil du temps. La première de ces menaces provint d'Égypte, la nation dont leurs ancêtres avaient été libérés. Le pharaon Méneptah, fils de Ramsès II, mena des campagnes militaires en Libye, mais aussi en Canaan, entre 1208 et 1203 av. J.-C., bien qu'il fût déjà âgé à cette époque, âgé d'environ 60 ou 70 ans, car son père avait vécu et régné longtemps. À sa mort en 1203 av. J.-C., une stèle de victoire fut érigée pour relater ses exploits militaires. Découverte en 1896 à Thèbes, elle est reconnue comme la première preuve archéologique portant le nom "Israël". En effet, l'une des dernières lignes de la stèle (ligne 27) mentionne :


Les chefs tombent en disant : "Paix !"

Pas un seul ne relève la tête parmi les Neuf Arcs.

Défait est le pays des Tjehenou [Libye].

Le Hatti [Hittite] est pacifié.

Canaan est dépouillée de tout ce qu'il avait de mauvais.

Ashkelon a été conquise. Guézer a été prise.

Yano'am est devenue comme si elle n'avait jamais existé.

Isra'el est détruit, sa semence même n'est plus.

Hourrou [Syrie] est devenue une veuve pour l'Égypte.

(Stèle de Méneptah, transcription sur Wikipédia)


Cette campagne s'est principalement déroulée le long de la plaine côtière de Canaan et de sa région sud, attaquant le pays des Philistins et certaines des tribus israélites qui y vivaient, comme Siméon et Dan.


La stèle de Méneptah
La stèle de Méneptah (Musée du Caire)

Cette campagne en Canaan est avérée, et il ne fait aucun doute que des Israélites vivaient dans les régions attaquées par Méneptah. Le mot Israël s'écrit en hiéroglyphes i-s-r-a-a-r, transcrit en Israël, en supposant que le dernier "r" aurait dû être un "l".


Le mot Israël dans la stèle de Méneptah
Le mot Israël dans la stèle de Méneptah

Outre le nom Israar/Israël, le texte mentionne également qu'il s'agissait d'un "peuple" et non d'une cité-État comme celles mentionnées sur la stèle (Guézer, Ashkelon, etc.) ou d'une terre (comme Canaan). En effet, les langues anciennes, et l'hébreu moderne, utilisent des formes féminines pour désigner des villes, des terres ou des pays. Or, la forme utilisée pour Israël est masculine et désigne donc un peuple. Cela suggère qu'Israël était un peuple étranger à la terre de Canaan, et non des villes ou royaumes locaux, et c'était effectivement le cas pour les tribus israélites à cette époque, celle des Juges.


La stèle mentionne également Canaan comme "Kanaan, un ennemi d'une terre étrangère" :


Canaan dans la stèle de Méneptah
Canaan dans la stèle de Méneptah

Cette stèle apporte donc une preuve supplémentaire importante : Canaan et Israël étaient considérés comme deux entités distinctes à cette époque. Cela contredit les théories selon lesquelles les Israélites étaient des Cananéens, voire des Égyptiens, qui auraient soudainement adopté un nouveau culte ! En résumé, la stèle de Méneptah apporte trois points importants :


  • Première preuve archéologique du nom "Israël"

  • Israël était un peuple, et non une cité-État ou un royaume

  • Israël était distinct de Canaan


An hébreu 2558 – 1202 av. J.-C. – Mort du grand-prêtre Éléazar

Josué fut le premier des Anciens à mourir, et Éléazar, fils d'Aaron, le dernier (Josué 24:33). Il existe un parallèle avec la mort des fils de Jacob en Égypte : le premier à mourir fut Joseph (ancêtre de Josué) en l’an hébreu 2309 et le dernier fut Lévi (ancêtre d'Éléazar) en l’an hébreu 2331. Il y a donc une différence de 21 ou 23 ans entre les deux événements, selon l’année de naissance de Lévi. On peut donc supposer une différence de 22 ans, bien que cela n’affecte pas les principaux détails de la chronologie. Ici les circonstances avec Josué/Joseph et Éléazar/Lévi nous invitent à faire un parallèle : la même différence de 22 ans entre leurs décès peut s’appliquer à Josué et Éléazar. Autrement dit, Éléazar serait mort 22 ans après Josué, en l’an hébreu 2558.


Notez que le nombre 22 est lié aux Hébreux en Égypte, car le mot pour Pessa’h est פסח, dont la valeur numérique est 8 + 60 + 80 ; mais le petit décompte, qui ne prend en compte que les nombres de 0 à 9, donne 8 + 6 + 8 = 22 ; 22 représente également le nombre de lettres de l'alphabet hébreu, transmis aux Hébreux avec la Torah.


Quel âge avait Éléazar à sa mort ? Bien que le texte ne le mentionne pas, on peut émettre quelques hypothèses. Dans le désert, à l'époque des explorateurs, Éléazar avait moins de 30 ans, sinon il aurait participé au service divin comme ses deux frères aînés, Nadab et Abihu, car l'âge minimum pour devenir prêtre était de 30 ans.


Il dit à Moïse : "Monte vers l'Éternel, toi, Aaron, Nadab et Abihu, et soixante-dix des anciens d'Israël ; et vous vous prosternerez de loin. Moïse seul s'approchera de l'Éternel ; mais eux ne s'approcheront pas, et le peuple ne montera pas avec lui." (Exode 24:1-2)


Ainsi, si l'on suppose qu'Éléazar avait un peu moins de 30 ans en l'an hébreu 2456, il serait né un peu avant l'an 2425, ce qui ferait de lui un homme d'un peu plus de 133 ans à sa mort en 2558. Sa vie était plus longue que celle de la plupart des autres peuples, car Dieu avait décrété que la vie humaine ne devait pas dépasser 120 ans. Cependant, à cette époque, Dieu bénit les prêtres, les Lévites, en leur accordant une vie humaine plus longue. Cela changera cependant à une génération ultérieure, après la mort du grand-prêtre Éli.


L'âge d'Éléazar au moment de sa mort n'a aucune incidence sur la chronologie. S'il est effectivement mort à 137 ans, ce serait au même âge que son ancêtre Lévi (Exode 6:16).


Après Éléazar, son fils Pinéas devint grand-prêtre. Il transporta l'Arche d'Alliance de Shilo à Beth-El, ville où il s'était établi (Juges 20:26-28), à la frontière des territoires de Benjamin et de Manassé (Josué 18:13), du côté de Benjamin (Josué 18:22). Pour en savoir plus sur Beth-El, cliquez ici.


En l'an hébreu 2558, 104 ans s'étaient écoulés depuis l'Exode. Les Israélites en étaient à leur troisième génération depuis cet événement : la première génération quitta l'Égypte et mourut dans le désert ; la deuxième génération entra et conquit Canaan et mourut avant Éléazar et les Anciens ; et la troisième génération marqua le début de la période des Juges. Pendant ce temps, l'Égypte traversa une succession de troubles, causés soit par des envahisseurs étrangers, soit par des luttes de pouvoir internes, qui aboutirent à des divisions au sein du pays. Aucun pharaon ne mit les pieds dans le pays de Canaan pendant ces temps troublés, bien que de nombreux territoires conquis par les Israélites aient été vassaux de l'Égypte depuis l'époque des campagnes militaires de Séthi Ier et de Ramsès II.


An hébreu 2558 – 1202 av. J.-C. – La période des Juges

La génération qui suivit la mort de Josué et d'Éléazar commença immédiatement à pécher :


Toute cette génération fut rassemblée auprès de ses pères ; et après elle, une autre génération surgit, qui ne connaissait pas l'Éternel, ni l'œuvre qu'il avait accomplie en faveur d'Israël. (Juges 2:10)


Le texte ci-dessus présente une similitude frappante avec ce qui fut dit de l'Égypte après la mort des fils de Jacob, Joseph le premier et Lévi le dernier.


Joseph mourut, ainsi que tous ses frères et toute cette génération. Les enfants d'Israël furent féconds, se multiplièrent et devinrent extrêmement puissants ; et le pays en fut rempli. Un nouveau roi s'éleva sur l'Égypte, qui ne connaissait pas Joseph. (Exode 1:6-8)


La similitude entre la mort de toute la génération précédente et l'émergence d'une nouvelle génération ignorant le passé est un avertissement de la colère imminente de Dieu contre son peuple.


Comme premier péché, cette génération prit des épouses parmi les femmes cananéennes, et les femmes israélites épousèrent des hommes cananéens (parmi lesquels Samson, le juge, qui prit une Philistine pour épouse et qui eut plus tard une relation avec Dalila, une autre Philistine). Cela s'expliquait par le fait que les Israélites n'achevèrent pas leurs conquêtes et laissèrent de nombreux peuples cananéens installés sur leurs terres promises, parfois en échange d'un tribut. Ces mariages mixtes amenèrent les Israélites à adopter les rites des dieux païens de leurs voisins. Cela exaspéra Dieu, qui décida de punir Son peuple en perturbant la paix dont ils jouissaient jusque-là.


La première forme de châtiment viendrait d'ennemis étrangers venus piller les Israélites, et la seconde serait l'oppression exercée par les voisins des Israélites eux-mêmes, qui n'avaient pas été chassés de Canaan comme Josué l'avait souhaité, comme il est dit :


La colère de l'Éternel s'enflamma contre Israël, et il les livra entre les mains de pillards qui les pillèrent, et il les livra entre les mains de leurs ennemis d'alentour, de sorte qu'ils ne purent plus résister à leurs ennemis. (Juges 2:14)


Mais, en même temps, Dieu leur offrait le choix de la repentance en suscitant parmi eux des "juges" pour les ramener dans le droit chemin. Ainsi commença la période des Juges : douze d'entre eux, un issu de chaque tribu, présidèrent à tour de rôle au destin des Israélites, jusqu'à l'avènement de leur Royaume unifié.


L'Éternel suscita des juges qui les sauvèrent de la main de ceux qui les pillaient. Et pourtant, ils n'écoutèrent pas leurs juges, car ils s'égarèrent avec d'autres dieux et les adorèrent ; ils s'écartèrent promptement de la voie où marchaient leurs pères, obéissant aux commandements de l'Éternel ; ils ne firent pas ainsi. Et lorsque l'Éternel leur suscita des juges, alors l'Éternel fut avec le juge et les sauva de la main de leurs ennemis pendant toute la vie du juge ; car l'Éternel se repentit de leurs gémissements à cause de ceux qui les opprimaient et les brisaient. Mais il arriva, après la mort du juge, qu'ils revinrent et se corrompirent plus que leurs pères, en allant après d'autres dieux pour les servir et les adorer ; ils ne laissèrent rien de côté à leurs pratiques et à leur entêtement. (Juges 2:16-19)


Ainsi, après les pillards étrangers, les Israélites furent opprimés par leurs voisins. Car, voyant leur mauvaise conduite, Dieu ne leur permit plus de chasser complètement le reste du peuple cananéen après Josué. Il les laissa plutôt là où Josué les avait laissés, afin qu'ils puissent parfois opprimer les Israélites.


La colère de l'Éternel s'enflamma contre Israël. Il dit : "Puisque cette nation a transgressé mon alliance que j'avais prescrite à leurs pères, et qu'elle n'a pas écouté ma voix, je ne chasserai plus devant eux aucune des nations que Josué a laissées à sa mort. J'éprouverai ainsi Israël et verrai s'ils garderont ou non la voie de l'Éternel pour y marcher comme leurs pères l'ont gardée."

L'Éternel quitta donc ces nations sans les chasser précipitamment, ni les livrer entre les mains de Josué. (Juges 2:20-23)


Les Philistins opprimèrent les Israélites pendant plusieurs années, principalement vers la fin de la période des Juges et jusqu'à l'époque du roi David qui mit fin à leur oppression. Les Philistins étaient difficiles à vaincre, car leurs villes étaient protégées par d'impressionnantes murailles fortifiées et des portes massives. De plus, ils disposaient de chars de fer, parfaits pour livrer bataille dans les vallées. De leur côté, les Israélites trouvaient refuge dans les régions montagneuses de Judée et de Samarie, où les chars ennemis ne pouvaient s'aventurer facilement (Juges 1:19).


Les Israélites avaient réussi à conquérir toutes les villes des collines, à l'exception de celle des Jébuséens, au sud de l'actuelle Jérusalem, dont la conquête avait été confiée à la tribu de Benjamin (Juges 1:20).


La période des Juges peut être divisée en trois périodes, chacune commençant par le texte affirmant que les enfants d'Israël […] servaient les Baals [les idoles].


Dans la première période (Juges 3:7), Dieu envoya des pillards étrangers contre les Israélites, les Araméens. Puis il envoya leurs voisins devenus. Cinq juges furent nommés pour redresser Israël dans le droit chemin : Othniel de Juda, Éhud de Benjamin, Shamgar de Nephtali, Débora d'Éphraïm et Gédéon de Manassé. Cette première période dura 84 ans, de la mort d'Éléazar à celle de Gédéon.


Dans la deuxième période (Juges 8:33), Dieu plaça Israël dans les mains de leurs voisins directs, mais à un degré moindre que précédemment, car cette fois, le texte dit qu'Israël s'est égaré auprès des Baals plutôt que les a servis. Autrement dit, les Israélites n'ont pas péché aussi gravement durant cette deuxième phase, leur châtiment a donc été moins sévère. Dieu a suscité deux juges pour redresser Israël : Thola d'Issachar et Yaïr de Manassé en Galaad. Cette deuxième période ne dura que 26 ans.


Puis vint la troisième période (Juges 10:6), où les Israélites de presque toutes les tribus servirent tous les Baals de leurs voisins, comme si le contact avec eux durant la période précédente, même s'il s'était produit dans un contexte de guerre, avait finalement exercé une mauvaise influence sur les Israélites. Cette fois, Dieu mit la plupart des tribus d'Israël en difficulté, mais il suscita cinq juges pour contenir le joug de leurs ennemis : Yiftah de Galaad, Ibzan de Juda, Élon de Zabulon, Avdon d'Éphraïm et Samson de Dan. Cette période dura 31 ans, jusqu'à l'onction du premier roi d'Israël, le roi Saül.


Au total, le mandat des Juges dura environ 141 ans. Cependant, le Seder Olam estimait que le mandat des Juges avait duré environ 352 ans, car il additionnait les mandats de chaque juge de manière continue, l'un après l'autre. Cette approche est sujette à discussion, même parmi les érudits religieux, car les juges étaient issus de tribus différentes et agissaient dans différentes parties du pays sans corrélation. Ils agissaient donc à des moments différents et, parfois, en parallèle, sur différentes parties du territoire d'Israël. Comme le mentionne le dernier verset du livre des Juges :


En ce temps-là, il n'y avait pas de roi en Israël ; chacun faisait ce qui lui semblait bon. (Juges 21:25)


Un deuxième point à considérer concernant l'approche du Seder Olam est que, en attribuant à la période des Juges une durée de l'ordre de 350 ans, celle-ci entre en conflit de date avec la période des rois, qui suivit, ce qui met en contradiction l'époque des rois israélites avec la datation des découvertes archéologiques et avec d'autres sources historiques des nations voisines.


Un dernier point à considérer concerne les générations décrites dans le Livre des Chroniques. Si l'on examine la généalogie du futur roi David, à partir de son ancêtre Nahshon, chef de la tribu de Juda qui quitta l'Égypte lors de l'Exode, la succession était la suivante : Nahshon (génération 3) => Salma (qui participa à la conquête de Canaan, génération 4) => Boaz (qui épousa Ruth la Moabite) => Obed => Jessé => David (génération 8, David était également son 8e fils selon le livre de Samuel) (pour la symbolique juive des nombres, cliquez ici). La période des Juges prit fin avec le règne du prophète Samuel et du roi Saül. Autrement dit, David appartenait à la cinquième génération humaine, de la conquête jusqu'à la fin de la période des Juges. En supposant une moyenne de 25 à 30 ans par génération humaine (avant la naissance de l'enfant et de la génération suivants), cela représenterait 125 à 150 ans pour cette période, ce qui correspond à la période de 141 ans, mais bien en deçà des 352 ans calculés par le Seder Olam.


Après trois périodes de tentatives pour redresser les Israélites, il devint évident que l'envoi de juges ne suffisait pas. L'absence de commandement et de politique centralisés entraîna tour à tour les différentes tribus d'Israël dans l'égarement, et un juge d'une tribu ou d'une autre ne suffisait jamais à influencer l'ensemble des 12 tribus.


Ainsi, même si Dieu était initialement réticent à permettre à Son peuple d’avoir un roi, il devint une nécessité de former une nation unifiée autour d’un roi, choisi par Dieu lui-même, qui imposerait son autorité et pourrait plus aisément guider le peuple dans les lois divines.


An hébreu 2558 – 1202 av. J.-C. – Les Araméens

Peu après la mort d'Éléazar, les tribus israélites des vallées furent soumises pendant huit ans par un roi étranger appelé Kushan-Rishatayim d'Aram-Naharayim. Aram-Naharayim a déjà mentionné dans la Genèse lorsqu'Éliézer, le vieux serviteur d'Abraham, se rendit au nord de Charran 470 ans plus tôt pour trouver une épouse pour Isaac (voir document F18). Il s'agit du pays d'Aram, situé au nord de l'ancienne Mésopotamie. À cette époque, les Araméens avaient formé un royaume qui fut ensuite détruit par les Assyriens.


Le royaume d'Aram
Le royaume d'Aram

Le nom de ce roi Kushan-Rishatayim contient le mot shatayim qui signifie "deux". Il pourrait s'agir d'un roi nommé "le Second", comme Pahir-Ishshan II, mais l'histoire sait peu de choses sur les premiers rois d'Aram. Une autre possibilité est que ce roi soit devenu roi par l'alliance de deux peuples, les Araméens et les "Ahlamû", l'existence de ces derniers étant attestée par des inscriptions datant du règne de Tiglath-Piléser Ier d'Assyrie (autour de 1100 av. J.-C.), tandis que les premiers seraient le peuple dominant de la région au cours des siècles suivants. Le nom Ahlamû signifie "errants" ce qui suppose qu'il s'agissait d'une tribu nomade installée en Aram-Naharayim. Ce nom pourrait avoir des racines sémitiques et hébraïques pour dire Ahel-amû, qui signifie "tente de peuple", ce qui convient parfaitement aux nomades. Quel que soit ce roi, il est venu avec une vaste armée et de nombreux chars, pour attaquer les vallées de Canaan. Son invasion, cependant, n'affecta pas beaucoup les tribus des régions montagneuses, y compris la majeure partie de Juda.


An hébreu 2566 – 1194 av. J.-C. – Juge Othniel de Juda

Après huit ans de joug araméen, en an hébreu 2566, les Israélites des vallées furent délivrés par le juge Othniel, fils de Kenaz, frère cadet de Caleb, de la tribu de Juda, qui était juge de sa tribu depuis la mort de Josué. À cette époque, les Israélites demandèrent à Dieu un nouveau chef, et Dieu désigna la tribu de Juda pour ce rôle (Juges 1:1-2). Othniel était déjà l'héritier de Caleb en menant la guerre pour la conquête des collines de Judée, et il épousa sa cousine Acsa, la fille de Caleb (Juges 1:11-13).


Othniel avait été juge de Juda pendant 40 ans, après la mort de Josué en 2536, lorsqu'il mourut en l'an hébreu 2576. Le fait qu'Othniel fût le chef de la tribu de Juda au lieu d'un des fils de Nahshon, décrit comme le prince de Juda au moment de l'Exode et dans le désert, pourrait être une indication de la raison pour laquelle l'un des fils de Nahshon, Élimélech, quitta sa tribu, peut-être par amertume, et s'installa en Moab avec sa femme Naomi et ses deux fils. Cependant, le frère d'Élimélech, Salma ou Salmon, resta sur le territoire de Juda et eut un fils appelé Boaz.


An hébreu 2576 – 1184 av. J.-C. – Guerre civile contre la tribu de Benjamin

C'est après la mort d'Othniel en l'an hébreu 2576 que se produisit l'un des événements les plus tragiques de l'histoire israélite. Les détails sont relatés à la fin du livre des Juges, mais elle se déroula au début de cette période, après la mort du juge Othniel, alors qu'aucun autre juge de Juda ne pouvait juger les tribus. Le seul à pouvoir influencer le déroulement des événements était le grand-prêtre Pinéas, petit-fils d'Aaron. Cependant, il vivait à Beth-El (au sujet de Beth-El, cliquez ici), à la frontière du territoire de Benjamin, et ne pouvait donc probablement pas se sentir en position de prendre parti contre ses hôtes. Pour rappel, les Lévites ne possédaient pas de territoire propre, mais vivaient au milieu des différentes tribus, dans des villes qui leur étaient réservées.


La Bible raconte qu'un Lévite revenait de Bethléem avec sa nouvelle épouse, qui était une femme de mauvaise réputation. En route vers le territoire d'Éphraïm, d'où était originaire le Lévite, le couple dut traverser le territoire de Benjamin et trouva refuge pour la nuit dans la maison d'un vieil homme de la ville de Guibéa. Mais, cette nuit-là, le comportement des habitants de la ville rappelait celui de Sodome envers les visiteurs de Loth à l'époque d'Abraham (voir document F18). La similitude des deux comportements est soulignée par le fait que les deux textes figurent au même numéro de chapitre : Genèse 22 pour Sodome et Juges 22 pour Guibéa :


"Fais sortir l'homme qui est entré dans ta maison, afin que nous le connaissions." (Juges 19:22)


Leurs méfaits finirent par entraîner le viol et la mort atroce de la femme du Lévite. Avec la dépouille de son épouse, il quitta la ville et informa les tribus d'Israël des agissements de cette ville, ce qui provoqua leur répulsion envers les habitants de Guibéa. Au total, 400.000 hommes se rassemblèrent pour décider que les coupables devaient être exécutés afin que, comme ils le déclaraient, nous éloignions le mal d'Israël (Juges 20:13).


Le Lévite à Guibéa
Le Lévite transportant le corps de sa femme à Guibéa (Gustave Doré, 1868)

Mais il n'y avait pas de juge actif auprès des Israélites à cette époque et chaque tribu agissait comme elle l'entendait. Ainsi, la tribu de Benjamin refusa de condamner sa ville et une guerre civile éclata. Leurs forces s'élevaient à 26.000 hommes, auxquels s'ajoutaient les 700 hommes de Guibéa. Bien qu'inférieurs en nombre, les Benjaminites étaient habiles au maniement de la fronde, manquant rarement leur cible, et ils étaient gauchers, tout comme Benjamin, fils de Jacob, leur ancêtre. Selon une étude scientifique du Wellcome Trust Centre for Human Genetics de l'Université d'Oxford, être gaucher constitue un avantage au combat (pour en savoir plus, cliquez ici).


Le premier jour, Benjamin tua 22.000 Israélites, puis 18.000 le deuxième. Avant le combat du troisième jour, le grand prêtre Pinéas annonça que Dieu livrerait les Benjaminites aux mains d'Israël :


L'Éternel frappa Benjamin devant Israël ; et les enfants d'Israël tuèrent ce jour-là vingt-cinq mille et cent hommes de Benjamin ; tous tirèrent l'épée. (Juges 20:35)


Ce fut un grand massacre pour la tribu de Benjamin, qui comptait 26.700 hommes au total, car 25.100 d'entre eux moururent ce jour-là. La tribu fut presque entièrement anéantie, à l'exception de 1600 hommes survivants qui livrèrent une dernière résistance au Rocher de Rimmon. Cette formation rocheuse dans les collines de Samarie existe encore aujourd'hui (localisation : 31o56'43N 35o17'12E), bien que fortement érodée après 3000 ans.


Mais, le soir venu, les tribus d'Israël furent attristées d'avoir failli exterminer la descendance de l'un de leurs frères et ne purent accepter l'anéantissement total de l'une des douze tribus d'Israël. Ils épargnèrent donc la vie des derniers hommes de Benjamin. Mais, ayant auparavant juré de ne jamais leur donner leurs filles en mariage, les Israélites partirent en expédition contre une ville israélite appelée Jabès-Galaad (à l'est du Jourdain). Pourquoi? Car cette ville fut la seule à ne pas avoir répondu à l'appel aux armes contre Benjamin et ne subit donc aucune perte. En guise de punition, les Israélites massacrèrent les habitants de la ville à l'exception des jeunes femmes : ils en trouvèrent 400 et les emmenèrent à Shilo pour que les fils de Benjamin les prennent pour épouses et repeuplent leur tribu. Ces 400 femmes ne suffisaient cependant pas pour les 1600 survivants de Benjamin. On chercha donc une autre solution pour les 1200 restants.


Ils dirent : "Voici, la fête de l'Éternel a lieu chaque année à Shilo, au nord de Beth-El, à l'orient de la route qui monte de Beth-El à Sichem, et au sud de Levona." Ils donnèrent cet ordre aux fils de Benjamin : "Allez-vous mettre en embuscade dans les vignes ; et voyez, si les filles de Shilo sortent pour danser, sortez des vignes, et que chacun prenne sa femme parmi les filles de Shilo, et retournez au pays de Benjamin. Et lorsque leurs pères ou leurs frères viendront contester avec nous, nous leur dirons : Accordez-nous leur grâce, car nous n'avons pas pris une femme pour chacun à la guerre ; et vous ne les leur avez pas données, pour vour croire maintenant coupables [du serment précédent]." Les fils de Benjamin firent ainsi. Ils prirent des femmes, selon leur nombre, parmi celles qui dansaient, qu'ils enlevèrent. Ils s'en allèrent et retournèrent dans leur héritage, bâtirent des villes et s'y établirent. (Juges 21:19:23)


Shilo fut choisie parce qu'elle était une ville de prêtres, avant que l'Arche d'Alliance ne soit déplacée par Pinéas à Beth-El. Ces prêtres ne pouvaient participer à aucune guerre. Ils épargnaient donc les pertes de la guerre contre Benjamin. Leur tribut consistait à fournir des jeunes filles aux hommes de Benjamin.


Après cet événement, et à la mort de Pinéas, l'Arche d'Alliance fut ramenée de Beth-El à Shilo. Selon la Tradition, le reste du peuple de Benjamin qui n'avait pas pu prendre femme, quitta la terre d'Israël après cette guerre civile. Ils auraient trouvé un passage maritime avec les premiers Phéniciens et se seraient installés là où ils fondèrent une ville qui deviendrait une puissance militaire quelques siècles plus tard : Rome. Certains détails sur la naissance de Rome corroborent la théorie d'une origine benjaminienne (quoiqu'à Rome, la théorie la plus répandue est que les fondateurs de Rome avaient été des Troyens en fuite) :


  • Les frères Romulus et Rémus furent abandonnés, nouveau-nés, sur une rivière avant d'être sauvés par une louve ; cela rappelle la naissance de Moïse, un récit qui ne trouve son origine que dans la Bible.

  • Le symbole de Rome est la louve : la louve était également le symbole de Benjamin, décrit par son père Jacob comme un loup prédateur (Genèse 49:27) ; ce verset est le seul passage de la Torah où le mot loup est mentionné.

  • La fondation de Rome par Romulus eut lieu après qu'il eut tué son propre frère Rémus lors d'une querelle. Cela rappelle les tribus d'Israël combattant leurs propres frères, la tribu de Benjamin, dans une guerre civile fratricide.

  • Rome fut fondée dans une région vallonnée, comme le territoire de Benjamin en Canaan, ce qui pourrait expliquer pourquoi les Benjaminites avaient choisi ce lieu pour s'installer, car il leur rappelait leur patrie.

  • La ville fut nommée Roma, un nom similaire à Ramah, qui signifie "hauteur" en hébreu, identique aux noms ou préfixes des villes du territoire vallonné de Benjamin.

  • L'enlèvement des Sabines lors d'une fête, pour contribuer au peuplement initial de Rome, rappelle les filles de Shilo, également enlevées lors d'une fête.


La louve allaitant Romulus et Rémus
La louve allaitant Romulus et Rémus

An hébreu 2577 – 1183 av. J.-C. – Les Moabites – Boaz et Ruth

L'expédition des Israélites de l'autre côté du Jourdain, contre la ville de Jabès en Galaad, fournit un prétexte à Églon, roi de Moab, pour les attaquer après leur guerre civile. Car il savait que, sans les hommes habiles de la tribu de Benjamin dont le territoire était situé à l'ouest de l'autre côté du Jourdain, Galaad n'était plus défendu. C'était une bonne occasion pour les ennemis des tribus d'Israël de se débarrasser du joug israélite. Églon forma une coalition avec les Ammonites au nord et les Amalécites au sud et soumit le pays de Canaan à leur joug pendant 18 ans (Juges 3:14).


Les Moabites étaient les descendants de Moab, fils né d'une relation incestueuse entre Loth et l'une de ses deux filles (voir document F18). Le roi David descendra de Ruth la Moabite, qui épousa Boaz de Juda. Comment cette liaison interdite s'est-elle produite ? Un homme nommé Élimélech, originaire de Bethléem en Juda, quitta sa tribu sous prétexte de famine et s'installa au pays de Moab avec sa femme Naomi et ses deux fils. Ils y restèrent une dizaine d'années, durant lesquelles les deux fils épousèrent deux Moabites, dont l'une s'appelait Ruth. Mais tous trois moururent, le père et ses deux fils, probablement punis par Dieu pour avoir abandonné leur terre et pour avoir épousé des étrangères. Lorsque Naomi décida de retourner à Bethléem, Ruth, une de ses deux belles-filles, décida de ne pas l'abandonner et prononça cette célèbre réponse :


Ruth dit : "Ne me supplie pas de te quitter et de m'éloigner de toi ; car où que tu ailles, j'irai ; et où que tu demeures, j'habiterai ; ton peuple sera mon peuple, et ton Dieu mon Dieu ; où que tu meures, je veux mourir aussi et y être enterrée ; que l'Éternel m'en fasse autant et plus, si jamais je me sépare de toi autrement que par la mort !" (Ruth 1:16-17)


Ruth suivit Naomi en Juda et finit par rencontrer et épouser Boaz, le neveu d'Élimélech. Boaz et Ruth devinrent les grands-parents de Jessé, le père du futur roi David :


Voici la généalogie de Pérets [fils de Juda et de Tamar] : Pérets engendra Hetsron ; Hetsron engendra Ram ; Ram engendra Amminadab ; Amminadab engendra Nahshon [génération de l'Exode] ; Nahshon engendra Salmon [génération née dans le désert et entrée en Canaan] ; Salmon engendra Boaz ; Boaz engendra Obed ; Obed engendra Jessé ; et Jessé engendra David. (Ruth 4:18-22)


Comme mentionné précédemment dans ce document, cette généalogie confirme qu'il n'y a eu que cinq générations humaines entre la conquête de Canaan et le début de la période du royaume israélite. Par conséquent, la période des Juges s'est étendue sur un nombre d'années plus restreint que ce que supposent généralement les historiens et la tradition juive par le Seder Olam.


Ruth et Jessé sont tous deux enterrés au même endroit, à Hébron.


Tombeau de Jessé et de Ruth
Tombeau de Jessé et de Ruth (photo : Albert Benhamou)

An hébreu 2595 – 1165 av. J.-C. – Juges Éhoud de Benjamin et Shamgar de Nephtali

Contre toute attente, et malgré le plan machiavélique d'Églon, le salut contre le joug des Moabites est venu de la tribu de Benjamin elle-même, avec Éhoud, fils de Guéra. Ce juge se rendit à Jéricho, où résidait Églon, et l'assassina. Cet acte de courage déclencha une révolte générale des Israélites vivant dans les montagnes contre leurs oppresseurs.


Éhoud tue Églon, roi de Moab
Éhoud tue Églon, roi de Moab (Ford Madox Brown, 1880)


Alors qu'Éhoud agissait contre les Moabites dans les montagnes, un autre juge le suivait pour soulever les Israélites contre le joug des Philistins dans les plaines. Il s'agissait de Shamgar, fils d'Anath (Juges 3:31). Qui était Anath ? Son nom est mentionné dans la Bible comme étant Beth-Anath (Josué 19:38), signifiant "la maison d'Anath", une ville de la tribu de Naphtali, dont le territoire se trouvait en Basse-Galilée. C'est ainsi que nous apprenons que Shamgar était un juge de la tribu de Naphtali.


Après la mort d'Éhoud et de Shamgar, les régions montagneuses restèrent en paix pendant les 80 années suivantes (Juges 3:30), jusqu'en l'année biblique 2675. Mais les Israélites des plaines commencèrent à pécher de nouveau (Juges 4:1), de sorte que les calamités suivantes s'abattirent sur eux seulement, du nord et du sud du pays.


An hébreu 2595 – 1165 av. J.-C. – Les Hazorites et les Madianites

Contre les Israélites des plaines, Dieu suscita Jabin, roi de Hatzor, une importante cité-État cananéenne située au nord de la Terre d'Israël. C'était un chef puissant, doté de 900 chars de fer. Ses chars pouvaient être efficaces dans les plaines, mais pas dans les régions montagneuses. Et les tribus israélites de ces régions marchaient sur la voie de Dieu depuis le juge Éhoud. Les Hazorites opprimèrent les Israélites des plaines pendant les vingt années suivantes (Juges 4:3). Des fouilles à Tel Hatzor ont permis de découvrir des tablettes cunéiformes mentionnant un monarque nommé Ibni Addi, où Ibni semble être le nom biblique Jabin/Yabin.



Tablette trouvée à Tel Hatsor, adressée au roi Jabin
Tablette trouvée à Tel Hatsor, adressée au roi Jabin (source : Ministère israélien des Affaires étrangères)

Du sud étaient arrivés les Madianites, un peuple nomade établi dans les déserts. Ils se déplacèrent vers le nord en très grand nombre, comme des sauterelles, pour camper au pays de Canaan. Leur joug dura sept ans (Juges 6:1-5). Leur présence poussa de nombreux Israélites à fuir et à se cacher dans les grottes des montagnes.


An hébreu 2602 – 1158 av. J.-C. – Gédéon, le juge de Manassé

Dieu inspira à Gédéon de lever une armée contre les Madianites qui s'étaient alliés aux Amalécites dans la vallée de Jezréel, au nord d'Israël. Mais Dieu ne fut pas satisfait de l'armée de Gédéon, trop nombreuse. Il souhaita plutôt frapper les envahisseurs par un signe clair de Sa puissance. Il demanda donc à Gédéon de diminuer la taille de son armée, qui se réduisit à seulement 300 hommes (Juges 7:7). Dieu inspira alors un songe à l'un des Madianites, songe qui, raconté et répercuté dans leur camp, accrût leur crainte avant la bataille imminente :


Les Madianites, les Amalécites et tous les fils de l'Orient étaient étendus dans la vallée comme des sauterelles, et leurs chameaux étaient innombrables, aussi nombreux que le sable du bord de la mer. Gédéon arriva, et voici, un homme racontait un songe à ceux qui le suivaient, et disait : "J'ai fait un songe, et voici, un gâteau d'orge est tombé dans le camp de Madian, est venu jusqu'à la tente, l'a frappée, et elle est tombée, et la tente est restée sens dessus dessous."

Son compagnon répondit : "Ceci n'est autre que l'épée de Gédéon, fils de Joas, homme d'Israël ; Dieu a livré Madian et toute l'armée entre ses mains." (Juges 7:12-14)


Gédéon rassembla aussitôt ses 300 hommes et les divisa en petits groupes pour lancer une attaque venant de plusieurs directions. Chacun devait porter une trompette et une torche pour allumer un feu. Cette attaque surprise, nocturne, sema la peur et la panique parmi l'ennemi, le forçant à fuir son camp.


Gédéon et les 300 Israélites
Gédéon et les 300 Israélites (Gilliam van der Gouwen, vers 1720)

La légende de Léonidas raconte la bataille des Thermopyles avec ses 300 Spartiates, lorsqu'ils combattirent un ennemi bien plus nombreux (il s'agissait de l'armée perse de Xerxès I). Elle s'inspire peut-être de l'histoire de Gédéon et de ses 300 hommes. Quoi qu'il en soit, Madian ne se souleva plus jamais contre Israël (Juges 8:28). Mais le dernier acte de Gédéon allait engendrer de nouveaux troubles :


Toutefois, ajouta Gédéon, "je voudrais vous demander une chose : donnez-moi chacun les boucles prises aux ennemis." En effet, ceux-ci avaient des boucles d’or, étant Ismaélites. Ils répondirent : "Volontiers nous les donnons." Et l’on étala un manteau et chacun y jeta les boucles de son butin. Le poids de ces boucles d’or qu’il avait demandées fut de dix-sept cents sicles d’or, indépendamment des croissants, des pendants d’oreilles, des vêtements de pourpre que portaient les rois de Madian, et des colliers qui étaient au cou de leurs chameaux. Gédéon en fit un éphod, qu’il plaça dans sa ville natale, à Ofra. Mais Israël y vint en faire l’objet d’un culte impur, et ce fut un écueil pour Gédéon et pour sa famille. (Juges 8:24-27)


Néanmoins, Israël connut la paix pendant les 40 années qui suivirent, du vivant de Gédéon.


An hébreu 2615–1145 av. J.-C. – Déborah, la prophétesse d'Éphraïm

De l'autre côté du pays, Déborah, une prophétesse d'Éphraïm, déclencha la révolte contre Hatsor. Elle rassembla une coalition d'Israélites des tribus du nord : Éphraïm, Manassé, Issachar, Naphtali et Zabulon, et les rassembla près du mont Thabor sous le commandement militaire de Barak, fils d'Abinoam, de la tribu de Naphtali. Ils vainquirent les Hatsorites, et la région connut la paix pendant les 40 années qui suivirent (Juges 5:31).


Nous savons que la tribu de Manassé était impliquée, car Makir, fils de Manassé (Nombres 27:1), est mentionné dans Juges 5:14.


Le Talmud rapporte une tradition selon laquelle Dieu remporta cette guerre. Le commandant de l'armée ennemie, Sisera, avait rassemblé une immense armée de 900 chars contre les Israélites (en comparaison, lors de l'Exode, Pharaon avait poursuivi les Hébreux jusqu'à la mer avec 600 chars). Mais Dieu intervint :


Lorsque Sisera vint [combattre Israël], il s'avança contre eux avec des bâtons de fer. Alors, le Saint, béni soit-Il, fit sortir les étoiles de leurs orbites contre eux, comme il est écrit : "Les étoiles, dans leur course, combattirent Sisera" [Juges 5:20]. Dès que les étoiles du ciel descendirent sur eux, elles échauffèrent ces bâtons de fer. Alors, ils [les soldats] descendirent se rafraîchir dans le torrent de Kishon. Le Saint, béni soit-Il, dit au torrent de Kishon : "Va et rends ta promesse." Aussitôt, le torrent de Kishon les emporta et les jeta à la mer, comme il est dit : "Le torrent de Kishon les a emportés, ce torrent ancien" [Juges 5:21]. Que signifie "ce torrent ancien" ? Le torrent qui était devenu une garantie depuis les temps anciens. À ce moment-là, les poissons de la mer ouvrirent [leur bouche] et s'exclamèrent : "Et la vérité du Seigneur demeure à jamais." (Talmud, Pessahim 118b)


Déborah la Prophétesse
Déborah la Prophétesse (Gustave Doré, 1866)

En 2010, l'archéologue israélien Adam Zertal (z”l) a découvert l'emplacement de la base militaire du général cananéen Sisera. Ce lieu s'appelle Harosheth-goyim (Juges 4-5), près de Wadi Ara (Nahal Iron). Sisera n'était pas un nom cananéen, sa famille était originaire de Sardaigne (il existe une ville appelée Sassari, dont le nom semble proche de Sisera). Ses ancêtres ont dû arriver en Canaan par l'une des vagues de Peuples de la Mer au Levant : ces peuples sont devenus des mercenaires appelés Shardana (nom proche du mot Sardaigne) au service des pharaons. Puis, lorsque l'Égypte a cessé ses campagnes en Canaan, les mercenaires ont offert leurs services à des rois cananéens tels que Jabin de la puissante Hatzor (pour en savoir plus sur ce sujet fascinant, cliquez ici).


Le camp des Shardana étant situé dans le Wadi Ara (qui traverse le mont Carmel) signifie qu'ils contrôlaient les passages stratégiques vers Megiddo et Taanach, à l'est du mont Carmel :


Les rois [envahisseurs] vinrent, ils combattirent ; oui ils combattirent, ces rois de Canaan, à Taanach, près des eaux de Megiddo ; ils n'en tirèrent aucun profit. (Juges 5:19)


Des vestiges archéologiques ont été découverts concernant la destruction totale de ces villes à l'époque de Déborah :


Des maisons imposantes, avec de nombreuses installations, situées aux extrémités sud et ouest, datent du XIIe siècle avant notre ère et furent complètement détruites vers 1125 av. J.-C. (Encyclopédie des fouilles archéologiques en Terre Sainte, article pour "Taanach", Jérusalem, 1978)


Comme le mentionne le texte biblique, ces villes n'avaient pas été conquises à l'époque de Josué, mais elles furent abandonnées à l'époque des Juges. Elles seront reconstituées en tant que villes de Judée à l’époque du roi Salomon.



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Albert Benhamou

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